🇨🇴 Au nom de la paix, vérité sur les exécutions extrajudiciaires des civils en Colombie (collectif Citoyenneté pour la paix de Colombie / Ciudadanías por la paz de Colombia / L’Humanité)


6 402 civils tués. Voici, si ce n’est plus, le nombre d’exécutions extrajudiciaires commis par l’armée colombienne dans la lutte contre les guérillas armées entre 2002 et 2008 selon la Juridiction Spéciale pour la Paix (JEP), l’organe juridique formé aux sorties des accords de paix de 2016 entre le gouvernement colombien et l’ancienne guérilla marxiste des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC). « Le pire crime contre l’humanité commis dans les Amériques depuis les dictatures sanguinaires », selon Gustavo Petro, le président de gauche actuel de Colombie.


Ces meurtres systématiques, répandus dans tout le pays, n’ont été que le reflet des exactions des militaires, commises sous les directives des hauts dirigeants du gouvernement d’extrême-droite de l’époque présidé par Álvaro Uribe Vélez (2002-2010). 

Depuis 1948, un conflit armé oppose guérillas, paramilitaires et gouvernements sur les politiques de gestion du territoire et dans la recherche de justice sociale. Dans son sillage et sous les politiques de financement des États-Unis post-attentat de 2001, le président Álvaro Uribe Vélez réclamait la mort de milliers de guérilleros dès son arrivée au pouvoir, au nom de « la politique de sécurité démocratique » du pays. Les chiffres des guérilleros tués, renommés « terroristes », auront été gonflés par les vies de civils. Jeunes, de milieu modeste, chômeurs, vulnérables mentalement ou physiquement, ces victimes devenaient les acteurs d’une mise en scène macabre. Transformés en guérilleros, pistolet en main et équipés en tenue de combattant révolutionnaire marxiste, ces innocents étaient mis en scène dans des luttes jusqu’à la mort, au cours de combats n’ayant jamais existé. L’objectif : maquiller ces meurtres pour rendre la politique sécuritaire crédible, transformant ces victimes en « positifs », des ennemis tués dans le jargon militaire. Le rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires en Colombie Philip Alston dénonçait dès 2010 les dérives et les conséquences graves de la politique de sécurité démocratique. 

Depuis quinze ans maintenant, les proches dénoncent ces « faux positifs » et demandent le nom des haut gradés à l’origine de ces ordres, ainsi que leur condamnation et celle de l’Etat. Le collectif des Mères des Faux Positifs (MAFAPO), né des répercussions de ces crimes, se bat pour découvrir la vérité malgré les obstacles. Procédures entravées, dossiers incomplets, la justice a des bâtons dans les roues, accuse Amnesty International en 2020. Et, lorsqu’elle agit, elle reste complaisante avec l’élite et les premiers responsables de ces crimes. « Traduire les accusés devant la justice ordinaire n’a pas été facile. Lors des audiences, les militaires ne sont souvent pas arrivés, l’avocat non plus ou disait qu’il était malade, ou pour une raison quelconque, ils les ont reportées » témoigne la membre du collectif MAFAPO Jacqueline Castillo. (…)

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