🇦🇷 Un an de Javier Milei (revue de presse)


Voilà un an que Javier Milei est arrivé au pouvoir en Argentine : un an de mesures-choc, à l’image de ce qu’avait promis le dirigeant ultra-populiste et ultra-libéral qui avait promis d’utiliser « la tronçonneuse », pour réduire les dépenses publiques. Une thérapie de choc qui a certes permis de freiner l’inflation galopante, mais qui a aussi provoqué une explosion de la pauvreté. Revue de presse.

Photo Marcos Gomez, AFP. Javier Milei lors d’une assemblée électorale à La Plata, près de la capitale Buenos Aires, le 12 septembre 2023.

Un an après l’élection de Javier Milei : «53% de la population vit sous le seuil de pauvreté en Argentine» (Bertille Bohard – Libération)

Le président libertarien d’extrême droite se vante d’avoir réduit l’inflation et retrouvé l’équilibre financier du pays. Au prix pourtant d’une explosion de la précarité et du sacrifice des services publics, retrace la sociologue Maricel Rodriguez Blanco.

Discours de Javier Milei en direct à la télévision argentine le mardi 10 décembre.

Au pouvoir depuis un an en Argentine, le libertarien Javier Milei a respecté sa promesse de répondre à la crise économique en s’attaquant aux services de l’Etat à la tronçonneuse. Comme annoncé, le président d’extrême droite a opéré des coupes drastiques dans les services publics, mis en place une politique d’austérité sévère, fortement dévalué le peso. Il a ainsi réussi pu réduire fortement l’inflation – passée de 13 % en décembre 2023 à 2,7 % au mois d’octobre –, poison de l’économie argentine depuis des années. Mais le coût social est particulièrement élevé : 5 millions d’Argentins supplémentaires vivent désormais sous le seuil de pauvreté. Pourtant, cela ne suffit pas à entamer la popularité de l’ancien économiste aux rouflaquettes qui bénéficie toujours d’environ 50 % d’opinion favorable.

Maricel Rodriguez Blanco, maîtresse de conférences en sociologie à l’institut catholique de Paris et actuellement en Argentine, explique ce paradoxe par des sondages biaisés, l’action du parti présidentiel qui cache, derrière les chiffres, une dégradation inquiétante des conditions de vie du peuple argentin, même si un noyau dur continue de soutenir le président réactionnaire, dont les politiques profitent avant tout aux hauts revenus.

Il est vrai que le taux d’inflation a baissé, mais il ne faut pas considérer cela comme un succès. D’abord parce que c’est le résultat d’une série de politiques de dérégulation des marchés, de dévaluation du peso et d’austérité mises en place de façon drastique par Milei dès son arrivée au pouvoir en décembre [2023]. Le but du gouvernement était de rétablir un équilibre dans la balance commerciale. Ce qu’il a réussi, mais au prix d’environ 140 000 licenciements de travailleurs et travailleuses dans les secteurs publics et privés. Au prix également de baisses des dépenses publiques puisqu’il a réduit le nombre de ministères – passé de 18 à 8. Il a notamment supprimé le ministère des Femmes, du Genre et de la Diversité. Toutes ces politiques ont été menées à un rythme accéléré, en quelques mois à peine. Ce qui a porté un coup significatif aux classes moyennes et populaires : aujourd’hui, 53 % de la population vit sous le seuil de pauvreté en Argentine, c’est-à-dire environ 23 millions de personnes.

Par ailleurs, les inégalités sociales, qui sont très importantes, ont encore augmenté. La plupart des ménages en font les frais. Il est devenu difficile de se soigner, et les dépenses en matière de médicaments ont diminué. Il faut désormais payer en plusieurs fois pour s’offrir des produits de première nécessité. Enfin, 27 % de la population n’est plus en mesure de payer des services comme le gaz ou l’électricité. A Buenos Aires, les prix dans les supermarchés sont plus élevés que ceux que l’on trouve à Paris. Donc la situation socio-économique de l’Argentine reste très préoccupante.

La même fraction de la population qui, depuis les années 1970, y gagne à chaque fois qu’est imposée une politique libérale qui opte pour l’offre plutôt que la demande. Cette politique profite donc aux [personnes ayant de] très hauts revenus, qui travaillent à l’international, utilisent des monnaies fortes comme le dollar et délaissent les banques argentines. (…)

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En Argentine, un an de présidence de Javier Milei (Flora Genoux / TV5 Monde)

Javier Milei revendique des succès contre l’inflation et l’endettement public, malgré la hausse de la pauvreté argentine. Explications de notre correspondante, Flora Genoux, en direct de Buenos Aires.

Reportage de TV 5 Monde

Argentine : une politique économique aux dépends de la population (TV5 Monde)

Un an après son arrivée au pouvoir, le président argentin Javier Milei se targue d’avoir redressé l’économie du pays. Les chiffres lui donnent raison. L’inflation était de 13% lors de sa prise de fonction. Elle est désormais de 3%. Mais cette politique ultralibérale a de terribles conséquences : en 6 mois, la pauvreté a explosé.

Reportage de TV5 Monde

Argentine: Milei an I, entre stabilisation macro-économique et coût social (TV 5 Monde)

Le président ultralibéral argentin Javier Milei boucle mardi 10 décembre une année de présidence, revendiquant des succès incontestables contre l’inflation et l’endettement public, mais au prix d’une récession et d’un bond de la pauvreté qui jette une ombre sur la pérennité du “miracle”.

“Ils disaient que cela ne pouvait pas se faire, et nous l’avons fait!” A chaque sortie, Javier Milei ne manque pas de claironner que son gouvernement réalise “le plus grand ajustement budgétaire de l’histoire de l’humanité”. Et que les Argentins continuent pourtant d’adhérer à sa stabilisation d’une économie malade de longue durée.

L’inflation, à 193% en interannuel, reste une des plus élevées au monde. Mais à coups de “tronçonneuse” dans les comptes publics, d’émission monétaire asséchée, de subventions taries, elle a été contenue à 3-4% mensuels (2,7% en octobre) contre 17% en moyenne l’an dernier.

“No hay plata !” (Il n’y a pas d’argent) répétait à l’envi l’économiste-candidat “anarcho-capitaliste” Milei, annonçant qu’il n’y a “pas d’alternative à un choc” budgétaire pour un Etat pathologiquement endetté, spolié selon lui par une “caste” politique honnie et par la “gauche appauvrissante”.

Manifestation d'organisations sociales et caritatives contre le président Javier Milei, le 29 mai 2024 à Buenos Aires
Manifestation d’organisations sociales et caritatives contre le président Javier Milei, le 29 mai 2024 à Buenos Aires AFP/Archives Juan Mabromata

Le choc a été terrible, avec une dévaluation de 52% du peso dès les premiers jours, couplée à une inflation chronique encore pesante. Entre les postes supprimés (dans le public), et ceux perdus dans le privé par la chute d’activité, la saignée est estimée à 260.000 emplois perdus, selon les registres du Travail.

La pauvreté a bondi au premier semestre à 52,9%, chiffre que l’exécutif conteste, le considérant daté et déjà amélioré. Reste qu’elle n’avait jamais atteint 50% depuis une vingtaine d’années, quand l’Argentine se remettait à peine de sa “Grande crise” traumatique – et émaillée de violences – de 2001.

Malgré deux grèves générales tôt dans son mandat (une plus suivie que l’autre) et quelques manifestations tendues -notamment pour la défense de l’université publique- Milei se targue d’un soutien stable, qui confond ses critiques: autour de 45% d’image positive, voire près de 50%, selon certains sondages récents. Pourtant, une année de “communication Milei” a distillé dans la politique argentine une atmosphère viciée qui inquiète: journalistes montrés du doigt, adversaires politiques insultés, “brigade digitale” au service de la présidence amplifiant les saillies du chef de l’Etat. Le tout au nom de la “communication directe”. (…)

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« La situation actuelle nous renvoie à l’époque de la dictature » : en Argentine, dans les cortèges des fonctionnaires menacés par Javier Milei (Anaïs Richard / L’Humanité)

Ministères supprimés, vagues de licenciements : le président ultralibéral est prêt à tout pour réduire le déficit fiscal de son pays. Face à la menace, les fonctionnaires ont marché dans tout le pays, le 5 décembre.

Le 5 décembre 2024, 500 000 personnes ont participé à la manifestation nationale lancée le 5 décembre à l’appel de syndicats comme l’Association des travailleurs étatiques (ATE) contre la politique du président Javier Milei. © Paula Acunzo / ZUMA Press Wire / Shu / SIPA

rès d’un an après l’arrivée au pouvoir de Javier Milei, un homme déguisé en Oncle Sam déambule en tête d’un long cortège engloutissant les rues de Buenos Aires. Dans sa main gauche, une marionnette à l’effigie du président argentin. Dans sa main droite, une valise en cuir estampillée de trois lettres : FMI. Le curieux personnage se dirige d’un pas décidé vers la Casa Rosada, antre du pouvoir exécutif argentin.

Il fait partie des 500 000 participants à la manifestation nationale lancée le 5 décembre à l’appel de syndicats comme l’Association des travailleurs étatiques (ATE). Le slogan de la marche ? « La patrie n’est pas à vendre ! » Pendant près de trois heures, les artères menant à la Plaza de Mayo, centre névralgique des luttes, ont vu défiler un échantillon des Argentins les plus affectés par les « ajustements » de Milei : fonctionnaires, étudiants, retraités.

Entré en fonction le 10 décembre 2023, l’ultralibéral s’enorgueillit d’avoir réduit de moitié le risque de défaut de l’Argentine et endigué l’inflation chronique du pays. Elle s’élève à environ 3 % par mois, contre 17,5 % en moyenne l’an dernier. Mais à quel prix ?

Milei l’avait promis, à coups de meeting, tronçonneuse en main : avec lui, l’ennemi public numéro un serait l’État, une « organisation criminelle violente ». Des menaces mises à exécution en opérant de drastiques coupes dans son budget, qu’il a taillé à hauteur de 30 %. Il a réduit le nombre de ministères de moitié, de 18 à 9, supprimant ceux consacrés aux Droits des femmes, à l’Éducation ou à la Santé. (…)

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Voir également :
– Adolfo Pérez Esquivel, prix Nobel de la paix : « La cruauté du gouvernement de Javier Milei est le reflet de sa déshumanisation » (Tribune / L’Humanité)
– Argentine : la doctrine Milei un an après (David Copello / Le Grand Continent)
– Après un an sous Milei, l’Argentine dans un état catastrophique (Tribune de l’Assemblée des citoyens argentins en France – L’Humanité / Stéphane Ortega – Rapports de force)