🇲🇽 Au Mexique, des zones d’ombre subsistent sur la disparition des quarante-trois étudiants d’Ayotzinapa (Luis Reygada – L’Humanité / RFI)


Dans un pays qui compte près de 100 000 disparus depuis le lancement de la politique de « guerre contre les cartels », fin 2006, l’affaire de ces quarante-trois étudiants disparus continue de cristalliser l’indignation de toute une société. Malgré les avancées de l’enquête.

À Mexico, le 21 septembre dernier, les familles demandent justice pour leurs jeunes disparus en 2014.© Claudia Cruz/AFP

Parviendra-t-on à connaître un jour toute la vérité au sujet de « l’affaire des 43 », ces étudiants de l’école normale rurale d’Ayotzinapa victimes de disparition forcée la nuit du 26 septembre 2014, aux abords de la ville d’Iguala, dans l’État du Guerrero ? C’était une des promesses de l’actuel président mexicain, Andrés Manuel López Obrador (Amlo), au pouvoir depuis décembre 2018.

Si nul ne peut nier que les investigations ont énormément avancé ces dernières années, force est de constater que, neuf ans après l’enlèvement des étudiants par des forces de police, des zones d’ombre subsistent. Ce drame constitue à ce jour l’un des scandales les plus médiatisés dans un pays plongé depuis plus de quinze ans dans une spirale de violence inouïe.

Retour sur les faits. Destinée à former des enseignants ruraux, l’école d’Ayotzinapa accueille principalement des étudiants pauvres issus de zones marginalisées de l’État de Guerrero, gangrené par le narcotrafic. Ses étudiants, forts d’une longue tradition révolutionnaire, organisent chaque année une montée à la capitale pour participer aux commémorations en mémoire des victimes du massacre de Tlatelolco en 1968. La coutume veut qu’ils « confisquent » des autobus à Iguala, chef-lieu situé à 126 kilomètres, mais les choses tournent mal en cette nuit du 26 septembre 2014.

Un crime d’État

Tout porte à croire que, se croyant attaqué par un cartel rival, le maire de la ville – lié au crime organisé – aurait donné l’ordre d’éliminer les étudiants. Une seule chose est sûre : le groupe de jeunes âgés de 17 à 25 ans est attaqué par des policiers municipaux qui peuvent compter sur le soutien de la police de l’État de Guerrero, de la police fédérale, ainsi que sur celui de militaires. Trois jeunes y laissent la vie, tandis que 43 autres auraient été remis aux mains d’un cartel allié. Celui-ci les aurait assassinés avant d’incinérer leurs corps dans une décharge.

Malgré l’indignation générale provoquée par une affaire mettant en évidence la collusion entre pouvoirs politiques locaux, crime organisé et forces de police, le gouvernement du président Enrique Peña Nieto (droite, 2012-2018) a tout fait pour rapidement classer le dossier. Après une enquête bâclée et peu transparente, ses résultats sont rejetés par les parents des victimes et critiqués de toutes parts, des mouvements sociaux au bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme.

Fin 2018, l’arrivée au pouvoir d’Amlo (gauche) redonne un espoir aux familles des étudiants disparus. « Nous allons découvrir ce qui s’est réellement passé, découvrir où se trouvent les jeunes et punir les responsables », promet-il avant d‘annoncer la création d’une commission pour la vérité. Quatre ans plus tard, cette commission reconnaît les manquements imputables au plus haut niveau gouvernemental et conclut que les faits survenus à Ayotzinapa représentent un « crime d’État ». Sans pour autant parvenir à faire la lumière sur le sort des étudiants et l’endroit où se trouveraient leurs corps. (…)

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Étudiants disparus d’Ayotzinapa au Mexique: le gouvernement promet une transparence qui tarde à venir (RFI)

Au Mexique, les proches des quarante-trois étudiants disparus en 2014 s’apprêtent à marcher dans les rues de la capitale. Ils continuent d’exiger de la part des autorités des réponses sur ce qu’il s’est passé dans la nuit du 26 au 27 septembre à Iguala dans l’État de Guerrero. Si l’État mexicain sous le gouvernement d’Andres Manuel Lopez Obrador a promis la transparence, dans les faits ce n’est pas le cas.

Les photos des étudiants disparus de l’école normale d’Ayotzinapa. AP – Eduardo Verdugo

L’année dernière déjà, un rapport affirmait que les jeunes disparus n’étaient plus en vie. Ces derniers mois, l’affaire a connu plusieurs rebondissements, révélant un scandale d’État et qui confirme l’implication des forces de l’ordre et des forces armées dans l’enlèvement et la disparition des normaliens. À Mexico, l’avocat des familles, a récemment donné une conférence de presse avec des universitaires et experts indépendants qui ont étudié l’affaire, mais de nombreuses questions restent sans réponse, explique notre correspondante à Mexico, Gwendolina Duval.

Les parents des disparus ont été reçus par le président de gauche Andres Manuel Lopez Obrador qui nie l’implication de son gouvernement, lequel est accusé de cacher des preuves qui incrimineraient l’armée. 

Ces étudiants de l’école normale d’Ayotzinapa ont disparu dans la nuit du 26 au 27 septembre 2014 après s’être rendus à Iguala, où ils s’apprêtaient à monter à bord de plusieurs autobus pour se rendre à Mexico et participer à une manifestation. Selon les versions officielles, ils ont été détenus par la police, en collusion avec des criminels, et auraient été livrés au cartel des Guerreros Unidos qui les aurait assassinés.

Des pressions et des manœuvres militaires 

L’État et l’armée en savent plus que ce qu’ils veulent bien dire. Et ils doivent encore livrer des réponses pour que le voile soit enfin levé sur ce qui est arrivé aux 43 étudiants d’Ayotzinapa, qui depuis longtemps faisaient l’objet d’une surveillance militaire. 

« L’information est très fragmentée », estime Vidulfo Rosales, qui est l’avocat des familles des disparus. « Quand les étudiants sont arrivés à Iguala, il y a deux ou trois agents de l’intelligence militaires qui sont intervenus sur place et bien sûr, ils ont commencé à faire des rapports directement avec les étudiants, sur le terrain, jusqu’à la disparition mais depuis, nous n’avons plus l’information. Et c’est cette partie-là qu’on demande. » (…)

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Pour rappel, voir entre autres :
Étudiants disparus d’Ayotzinapa au Mexique: les experts indépendants incriminent une nouvelle fois les forces de sécurité (RFI)
Enquête sur les étudiants disparus au Mexique : arrestation de l’ex-procureur général (Le Monde / AFP)
Mexique: l’enquête des autorités pointée du doigt dans un rapport sur la disparition des quarante-trois étudiants (RFI)
Répression. Ils réclament « vérité et justice », de Paris au Chiapas (Rosa Moussaoui / L’Humanité)