Colombie: “el paro no para” (revue de presse)


Depuis la grève du 28 avril 2021, la mobilisation du peuple colombien ne faiblit pas malgré une répression d’une violence inouïe. Face à l’ampleur des manifestations, le président Iván Duque a dû retirer provisoirement son projet de réforme fiscale qui a déclenché un rejet massif et deux de ses ministres ont démissionné, mais il maintient un projet de réforme visant à privatiser le système de santé. Depuis trois semaines,  les syndicats, la jeunesse, les mouvements paysans, les communautés indigènes et afro-descendantes, les organisations féministes, les associations de droits humains et les partis politiques progressistes ont lancé plusieurs appels à la grève générale et occupent les routes et les rues des grandes villes, résistant courageusement aux violences policières et à l’intervention militaire. Un bilan approximatif  fait état d’une quarantaine de morts, de plusieurs centaines de disparitions, tortures et blessures graves, d’un millier de détentions arbitraires, d’une cinquantaine de cas d’agressions contre des journalistes ou des membres d’organisations humanitaires, d’une vingtaine de violences sexuelles et viols. La communauté internationale s’en inquiète et des mouvements de solidarité se développent.


Pourquoi les troubles en Colombie ne s’arrêteront pas de sitôt
Por qué los disturbios en Colombia no se detendrán pronto
(Angelo Cardona / Pressenza)

Manifestation suite au suicide d’une jeune fille après un viol commis par des policiers.
(15 mai Bogotá / Crédit image : Democracy Now)

Les manifestations en Colombie ont été déclenchées par la proposition d’une nouvelle réforme fiscale qui visait à réunir des fonds pour la relance économique générée par la pandémie. Une réforme qui prévoyait, entre autres, de taxer les produits les plus élémentaires du panier de la ménagère colombienne, une mesure qui finirait par plomber les poches des Colombiens, en particulier celles de la classe moyenne et des familles les plus pauvres qui ont été durement touchées par la crise générée par le coronavirus. La proposition de réforme fiscale, au milieu de « la plus grande crise que l’humanité ait connue depuis la Seconde Guerre mondiale », selon les termes d’Angela Merkel, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Des milliers de Colombiens ont rejoint la manifestation nationale organisée le 28 avril pour rejeter la réforme fiscale.

Le 2 mai, le président Iván Duque a annoncé le retrait de la réforme fiscale et a demandé de toute urgence qu’un nouveau projet de réforme soit traité. Selon le président,  »la réforme n’est pas un caprice, c’est une nécessité » et le nouveau ministre des Finances, José Manuel Restrepo, a également annoncé le 4 mai que le gouvernement n’investira plus 14 milliards de pesos (4,5 milliards de dollars) dans 24 avions de combat Lockheed Martin initialement prévus au budget.

Si ces annonces ont été un triomphe de la mobilisation sociale et en particulier des jeunes qui se sont mobilisés, le mécontentement social et les problèmes auxquels le pays est confronté sont beaucoup plus profonds et nécessitent des changements systémiques que le peuple colombien réclame depuis des années, pas seulement maintenant.

Les graves actes de répression, l’usage excessif de la force et la violation systématique des droits humains au milieu des manifestations par la police nationale et l’escouade mobile anti-émeute (ESMAD) ont accru le ressentiment des manifestants envers le gouvernement actuel et ses institutions.

L’ONG Temblores a signalé 39 décès avérés, 1 055 détentions arbitraires, 16 cas de violences sexuelles et plus de 350 disparitions jusqu’à présent dans le cadre des protestations. (…)

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La jeunesse en première ligne des manifestations sociales
(France 24 / AFP)

Juan Esteban Murillo, 21 ans, étudiant, participe à une manifestation contre le gouvernement à Medellin, en Colombie, le 12 mai 2021.
Manifestation à Medellín le 12 mai 2021. © AFP

La mobilisation des Colombiens dans la rue ne faiblit pas depuis trois semaines. Méfiante envers les institutions et appauvrie par la pandémie de Covid-19, la jeunesse colombienne est particulièrement engagée dans ces protestations populaires.  Sous la pression de la rue, le gouvernement a renoncé à un projet de hausse des impôts, déclencheur de la crise. Les violences pendant les manifestations ont fait au moins 42 morts, dont un policier, et plus de 1 600 blessés, selon les autorités. Mais depuis trois semaines, la mobilisation se maintient, révélant un profond malaise dans ce pays parmi les plus inégalitaires du continent.

La pandémie de Covid-19 a aggravé la pauvreté qui affecte désormais presque la moitié de la population (42,5 %). Près d’un tiers des jeunes n’étudient, ni ne travaillent (27,7 % des 14/28 ans), selon des statistiques officielles. Un sondage de Cifras y Conceptos, auprès de 2 556 jeunes de 13 villes, montre leur méfiance envers la présidence, la police et l’armée, ainsi que leur préoccupation pour le chômage, la pauvreté, la corruption, l’insécurité, les inégalités, l’accès aux études et la santé. De ce que ressentent ces jeunes, “la tristesse est en tête à 33 %. C’est le message le plus dur de cette enquête (…) un concentré de problèmes, de frustrations et d’inquiétudes”, explique César Caballero, directeur de l’institut. (…)

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Manifestations massives en Colombie
avant des pourparlers avec le président
(Pascale Mariani / France 24)

Des manifestations massives à nouveau ont eu lieu en Colombie, mercredi, à la veille de négociations avec le gouvernement pour trouver une issue à la crise sociale avivée par la répression policière. L’ancien président colombien et Prix Nobel de la Paix, Juan Manuel Santos, a appelé les autorités à assumer les excès des forces de l’ordre.

Des milliers de personnes sont descendues dans les rues de Bogota, de Cali, Medellin et d’autres villes de Colombie mercredi 19 mai, pour exiger des politiques plus solidaires face à la crise économique, aggravée par la pandémie de Covid-19, et dénoncer les violences policières. Une nouvelle journée de mobilisation à la veille d’une réunion capitale jeudi, la troisième entre le gouvernement et le Comité national de grève, initiateur du mouvement.

Les premiers pourparlers s’étaient tenus en début de semaine, mais les parties restent divisées quant aux excès des forces de l’ordre, dénoncés par plusieurs pays, l’ONU, l’Union européenne, ainsi que des ONG internationales et locales.

Le mouvement de contestation, qui a débuté le 28 avril contre un projet de hausse des impôts depuis retiré, a été vivement attisé par les violences policières qui ont fait au moins 42 morts, pour la plupart civils, et plus de 1 700 blessés, selon les autorités. (…)

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Le mouvement social prend de l’ampleur,
la police épinglée pour la violente répression
(Achim Lippold / RFI)

Des autobus remplis de manifestants circulent parmi la foule de marcheurs rassemblés dans les rue de Cali, en Colombie
Des communautés autochtones participent à une manifestation à Cali le 12 mai 2021. AP Photo / Andrés González

(…) Cali est l’un des épicentres de la mobilisation sociale qui secoue la Colombie depuis le 28 avril. Si la situation dans ce chef-lieu du Valle del Cauca – et carrefour du trafic de drogue – s’est un peu calmée après que la ville a connu des violences inédites, avec notamment des groupes armés tirant sur les manifestants, elle reste, selon Sandra Herran, imprévisible. Une partie des habitants sont toujours mobilisés et tous suivent les négociations en cours entre le gouvernement et le comité national de grève qui ont débuté dimanche dernier, pour l’instant sans grand résultat.

Le comité national de grève demande, entre autres, une démilitarisation de la police et le retrait des opérations de maintien de l’ordre de l’unité spéciale anti-émeute ESMAD. Une revendication difficile à obtenir, estime le professeur Sébastien Velut, spécialiste de la Colombie : « Cette revendication traduit surtout la grande méfiance de la population à l’égard des forces de l’ordre, qui dépendent du ministère de la Défense et qui ont été entraînées pour combattre la guérilla. »

Mais les pressions sur le gouvernement contre l’usage excessif de la force viennent aussi de l’étranger, de l’ONU et surtout des États-Unis, explique Yann Basset, professeur de sciences politiques à l’Université du Rosaire, à Bogota : « Récemment, une cinquantaine d’élus du Congrès se sont émus de la répression en Colombie et ont demandé au président Joe Biden de ne plus financer la police colombienne. Et ça, c’est une pression qui peut être efficace sur le gouvernement. » Selon Yann Basset, les forces de l’ordre agissent déjà moins violemment qu’au début des manifestations. (…)

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À Medellin, les peuples indigènes rejoignent la mobilisation
(Najet Benrabaa  / RFI)

Des manifestants sont descendus dans les rues de Medellín mercredi 19 mai pour exiger notamment des politiques plus solidaires face à la crise économique.
Manifestation à Medellín mercredi 19 mai. Reuters – Stringer

Le mouvement social se poursuit en Colombie après trois semaines de mobilisation. Pour l’instant, les négociations entamées dimanche dernier n’ont rien donné. Une rencontre est prévue ce jeudi entre le comité de grève et le gouvernement. Mercredi, les manifestants étaient encore nombreux dans les rues du pays. Malgré les débordements, la majorité est pacifique. Comme à Medellín, où la délégation des peuples indigènes, la Minga, a rejoint le cortège. Plusieurs défilés ont sillonné la ville dès 7h du matin, le mercredi 19 mai. Le point de rencontre final était le parc de Los Deseos, rebaptisé par les manifestants « parc de la résistance ». Un graffiti géant sur le sol l’immortalise. (…)

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Le Comité National de Grève annonce la poursuite des mobilisations
(Reynaldo Henquen / Radio Havane Cuba)

Manifestation en Colombie. Photo EFE/ Ernesto Guzmán Jr

Les membres du Comité National de Grève de Colombie, ont déclaré que les mobilisations se poursuivront parce qu’il n’y a pas encore d’accord avec le gouvernement d’Iván Duque alors que le pays est le théâtre, depuis 24 jours de manifestations pacifiques contre le modèle néolibéral, qui ont été sévèrement réprimées par les forces de sécurité. Le président de la Centrale Unitaire des Travailleurs (CUT), Francisco Maltés, a déclaré aux médias locaux qu’ils continueront à dialoguer avec l’exécutif national mais qu’ils n’abandonneront pas les grèves et les blocages. Peu avant d’entrer dans la réunion prévue ce vendredi avec les délégués du gouvernement pour le dialogue, le dirigeant syndical a déclaré qu’il y a “quelques points de convergence (…) et nous verrons si nous pouvons les développer aujourd’hui”. Dans le même temps, il a annoncé qu’ils se mobiliseraient prochainement pour soutenir “la motion de censure au ministre de la Défense, Diego Molano” et d’autres manifestations se dérouleront le 26 et le 28, jour anniversaire du début des manifestations, a rappelé Maltés. (…)

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La mobilisation des Indiens révèle les fractures de Cali
(Marie Delcas / Le Monde)

Passage de la minga à Puerto Resistencia. Photo : Nadège Mazars / Le Monde

Dans la troisième ville du pays, déchirée par la pauvreté, le racisme et le narcotrafic, les indigènes se sont joints à la mobilisation sociale. À Cali, la troisième ville de Colombie, le grand carrefour rebaptisé « puerto Resistencia » est bloqué par les manifestants depuis le 28 avril. Les Indiens venus prêter main-forte à la mobilisation urbaine sont passés dire au revoir, mercredi 12 mai. Joyeusement entassés dans leurs bus multicolores, ils ont été acclamés par la foule.

« Nous ne partons pas, nous nous déplaçons pour continuer la lutte dans nos territoires, contre le gouvernement d’Iván Duque et ses mauvaises réformes », précise le leader indien Ermes Pete Vivas. M. Duque a retiré, dès le 2 mai, la réforme fiscale à l’origine de la mobilisation sociale, sans réussir à la désamorcer. La virulence de la répression policière a envenimé la crise économique et sociale. Après Cali, c’est la ville de Popayán, encore plus au sud, qui s’est enflammée.

« Nous voulons un meilleur pays, c’est tout, explique Marlen, 47 ans, qui appartient à la communauté des Indiens Nasa. La police ne peut pas tuer comme ça. Il faut protester pour qu’elle arrête. » Son voisin GenaroIlamo précise : « Moi, je dis que si le gouvernement reconnaît ses crimes et demande pardon, les gens de Cali rentreront chez eux et nous dans nos réserves ». Mais la jeunesse n’est pas d’humeur conciliatrice. Wepe Muellas, 23 ans, lui aussi un Nasa venu du village de Toribio, entend bien « résister jusqu’à ce que Duque s’en aille ». Sur son torse tatoué, le portrait de ses ancêtres indigènes côtoie les mangas japonais. Les Indiens du département du Cauca et leur organisation, le Conseil régional indigène du Cauca (CRIC) ont de l’expérience en matière de lutte sociale, et de répression policière. « Cette fois, nous ne nous battons pas pour défendre les droits des peuples indiens, précise Ermes Pete. Cette fois, nous sommes en “minga” par solidarité avec le peuple colombien tout entier ». Marlen explique : « La minga, c’est le moment où tout une communauté se réunit, pour réaliser des travaux communautaires ou pour défendre ses droits. Participe qui veut. Le CRIC se charge du transport, chaque communauté de la nourriture, des hamacs et de tout le reste. Ceux qui sont restés dans les territoires contribuent en envoyant de la nourriture. Tous les trois jours, il y a relève : les gens qui sont fatigués rentrent et d’autres arrivent. » (…)

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Les exigences du Comité national de grève
(El Espectador / Traduction À l’Encontre)

Le gouvernement a demandé au Comité national de grève de «déclarer explicitement sa condamnation des blocages de route et du recours à la violence dans les manifestations». Le Comité national, pour sa part, a déclaré qu’il attendait une réponse concrète et sérieuse de l’État pour garantir l’exercice de la protestation. Alors que le gouvernement national, par la voix du Haut-commissaire pour la paix, Miguel Ceballos [en place depuis 2018], assure qu’«il existe une bonne volonté pour continuer à avancer» dans les dialogues [proposés par le gouvernement d’Iván Duque], le Comité national de grève affirme que «le gouvernement Duque ne veut pas négocier, refuse de fournir des garanties». C’est ainsi que se prononcent les parties ce lundi soir 17 mai férié, à l’issue d’une nouvelle réunion qui laisse sur la table, pour l’instant, les demandes de part et d’autre.

Le gouvernement a demandé au Comité national de grève d’émettre les condamnations susmentionnées, tout en remerciant l’Église catholique et les Nations unies pour leur accompagnement dans ce processus. Miguel Ceballos a annoncé que le dialogue avec le Comité de grève continuera d’avancer vers la mise en place éventuelle d’une table de négociation, pour laquelle une nouvelle réunion a été prévue le 20 mai à 7 heures du matin au siège de Compensar [caisse de compensation familiale et de santé], à Bogota. Le gouvernement national a annoncé que ce mardi 18 mai se réunira le Conseil national d’évaluation des garanties des manifestations publiques et pacifiques, réglementé par décret, mais a précisé qu’en aucun cas cela ne signifie que cette réunion remplace la table de négociation qui devrait être instaurée avec le Comité de grève.

De plus, le Comité de grève a été déçu par l’absence de réponses à se demandes de garanties pour la protestation, qui sont nécessaires «pour pouvoir commencer les négociations». Il souligne aussi que «le gouvernement a dit non à tout, et même n’a pas fait référence à plusieurs questions». Dans un communiqué, il a affirmé que «la véritable réponse que nous avons reçue aujourd’hui est la violence policière brutale qui s’est déchaînée depuis la nuit dernière (dimanche) à Yumbo [ville du département Valle del Cauca], avec au moins deux meurtres, 24 blessés et 18 disparus» [cette répression brutale s’exerce dans la foulée de celle exercée à Cali – par exemple dans le quartier pauvre de Siloe – ou à Popayán, où le viol par la police d’une jeune fille s’est produit, avec le suicide qui en a découlé]. (…)

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Voir également nos revues de presse précédentes et les communiqués de solidarité de France Amérique Latine
Colombie: troisième semaine de mobilisations, répression, solidarités 

Colombie : violence économique et répression en pleine pandémie
– FAL solidaire du peuple colombien en lutte. Les institutions françaises et européennes doivent exiger l’arrêt de la répression
Mobilisations et répression en Colombie (revue de presse fr./esp.)
– Colombie : “paro nacional” du 28 avril 2021. Multiples manifestations contre un projet de réforme fiscale