🇬🇹 Guatemala : malgré les embûches, Bernardo Arévalo finalement investi président (L’Obs avec AFP / Libération / La Hora / fr.esp.)
Élu en août sur la promesse de combattre la corruption, Bernardo Arévalo a été investi dans la nuit de dimanche 14 à lundi 15 janvier président du Guatemala, après des mois d’incertitude.
Bernardo Arévalo a tenu bon : malgré les multiples embûches semées par une élite politique et économique considérée comme corrompue, le dirigeant social-démocrate a été investi nouveau président du Guatemala dans la nuit de dimanche 14 janvier à lundi 15 janvier.
Depuis sa victoire surprise aux élections en août, l’ex-diplomate et sociologue de 65 ans a fait face à de nombreux obstacles dans le pays, qui figure au 150e rang sur 180 dans le classement de l’association anticorruption Transparency international.
Le parquet a multiplié les recours judiciaires (annulation des élections, suspension de son parti politique, levée de son immunité d’élu) vertement dénoncés par les États-Unis, l’Union européenne, l’ONU et l’Organisation des États américains (OEA).
Son investiture a même été retardée de plus de neuf heures par les débats menés au Parlement par les députés de droite alliés du président sortant Alejandro Giammattei.
Ce retard, qui a fait monter la tension, a même poussé les dirigeants internationaux présents, dont les présidents chilien Gabriel Boric et colombien Gustavo Petro ou encore le chef de la diplomatie de l’UE Josep Borrell, à appeler dans un communiqué « le Parlement à se conformer à son mandat constitutionnel pour remettre le pouvoir comme l’exige la Constitution ».
Finalement, la nouvelle Assemblée a porté à la tête du Parlement monocaméral un membre du camp présidentiel, pourtant minoritaire avec 23 députés sur 160, Samuel Pérez, 31 ans. Une première victoire éclatante pour le camp Arévalo qui a été ceint de l’écharpe bicolore peu après au Théâtre national. Son arrivée a été précédée des cris de ses soutiens : « Oui, c’était possible ! ».
« Merci à la jeunesse du Guatemala »
« Nous ne permettrons pas que nos institutions se plient à nouveau à la corruption et à l’impunité », a-t-il souligné dans ses premiers discours. « Ces derniers mois, nous avons été confrontés à des tensions et à des défis complexes qui ont conduit beaucoup à penser que nous étions destinés à un repli autoritaire », a-t-il déclaré, remerciant « les nations amies » : « Votre appui a été fondamental dans la défense des institutions démocratiques et la préservation d’un État de droit ».
Bernardo Arévalo a également tenu à dire « merci à la jeunesse du Guatemala qui n’a pas perdu l’espérance et merci aux familles qui ont cru à un futur différent et n’ont pas cru à la désinformation. Merci à ceux qui ont fait que le Guatemala change ».
Il a fixé « l’éducation, la santé, le développement et l’environnement » comme priorités de son gouvernement qui comprend « le plus grand nombre de femmes dans l’histoire » : sept sur quatorze ministres.
« Aujourd’hui, comme nation, nous sommes en train de faire l’histoire », a-t-il lancé, estimant que le pays a « une dette historique envers les peuples indigènes », qui représentent plus de 42 % des 17,6 millions de Guatémaltèques. « Il ne peut y avoir de démocratie sans justice sociale, ni de justice sociale sans démocratie », a-t-il dit sous les hourras.
Un « lent coup d’État » visant à contrecarrer le résultat des urnes
Fils du réformateur Juan José Arévalo, premier président démocratiquement élu du Guatemala en 1945 après des décennies de dictature, Bernardo Arévalo n’a eu de cesse de dénoncer un « lent coup d’État » visant à contrecarrer le résultat des urnes. (…)
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Au Guatemala, un Président au bout de la nuit ( François-Xavier Gomez / Libération)
Après plusieurs heures de manœuvres de la droite pour retarder son accession au pouvoir, le social-démocrate Bernardo Arévalo a revêtu l’écharpe présidentielle dimanche [14 janvier] juste avant minuit.
Dimanche matin, le président élu par les Guatémaltèques confiait à un média des Etats-Unis : «Je suis enthousiaste à l’idée d’en finir avec un processus long et tortueux.» Bernardo Arévalo ignorait qu’il n’était pas encore au bout de ses peines. Prévue pour se dérouler en début d’après-midi, la cérémonie de remise de l’écharpe bleue et blanche par son prédécesseur Alejandro Giammattei n’a pu se dérouler que vers minuit, après des heures de grande tension.
La cérémonie protocolaire devait intervenir après l’installation de la nouvelle chambre des députés, élue le même jour que le président, le 20 août. Mais des élus de droite, partisans du conservateur Giammattei, ont joué l’obstruction et prolongé jusqu’à l’absurde les débats pour retarder la prise de fonction d’un chef de l’Etat décidé à combattre la corruption. La majorité des députés ont notamment fait valoir que les 23 élus (sur 160) de Semilla, le parti de centre gauche du nouveau président, ne pouvaient pas siéger sous cette étiquette en raison d’une invalidation prononcée par le parquet il y a quelques mois. Après des heures de débats houleux, c’est finalement un élu de Semilla, Samuel Pérez Alvarez, 31 ans, qui a été désigné président de la Chambre.
Le coup de gueule du Colombien Petro
La nervosité n’a cessé de monter pendant la journée, alors que des manifestants pro-Arévalo se rassemblaient devant le bâtiment du Parlement. Les ministres des Affaires étrangères invités à la cérémonie se sont réunis afin de chercher une parade au comportement déloyal de l’opposition. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a haussé le ton dans un communiqué pour demander que la volonté populaire exprimée dans les urnes soit respectée. Mais le coup de gueule le plus retentissant est à mettre au crédit du président colombien Gustavo Petro : «Je ne quitterai le Guatemala que quand Bernardo Arévalo sera investi, même si je dois manquer le sommet de Davos», a tonné le dirigeant de gauche.
Quand les conditions ont enfin été réunies pour transmettre le pouvoir au nouveau président, certains invités s’étaient déjà éclipsés, dont le président du Chili, Gabriel Boric, qui invoquait un agenda chargé dans son pays ce lundi matin, ou le roi Felipe d’Espagne.
Cette ultime tentative de torpiller l’alternance démocratique illustre la panique d’un clan qui a tenu les rênes du pays quasiment depuis la fin des régimes militaires, en 1986. Le «pacte des corrompus», comme l’a baptisé la presse, réunit autour d’intérêts communs le patronat, la majorité de la classe politique et de nombreux éléments de l’armée. Tous redoutent aujourd’hui de devoir rendre des comptes devant la justice pour détournements de fonds, et, concernant certains militaires, pour les années de guerre civile (1960-1996) dont le bilan est évalué à 100 000 victimes civiles tuées dans le cadre de la répression contre les opposants, les syndicalistes ou de simples paysans. (…)
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Bernardo Arévalo da su primer discurso como presidente de Guatemala (La Hora)
Pour aller plus loin :
– Bernardo Arévalo, président du Guatemala : «Tant que l’on ne combattra pas la corruption, nous ne pourrons pas lutter contre la pauvreté» (David Siqueiros / Libération / article réservé aux abonné.es)
– Au Guatemala, le progressiste Bernardo Arevalo investi président au terme d’une journée pleine de tensions ( Anne Vigna / Le Monde / article réservé aux abonné.es)
Pour rappel, voir :
– Appel à la mobilisation le 14 janvier pour défendre la démocratie au Guatemala / Llamado a la movilización por el respeto de la democracia, junto a la «otra Guatemala» (communiqué collectif du 9 janvier 2024) (9 janvier 2024)
– L’autre Guatemala revient au nom de la démocratie (tribune de Sergio Ramírez / El País / Traduction FAL) (11 décembre)
– Au Guatemala, l’élection de Bernardo Arévalo garantie par le tribunal électoral (Le Monde / AFP)
– « L’Europe et la France doivent faire pression sur le gouvernement sortant du Guatemala afin qu’il respecte l’expression de la volonté populaire » (Tribune collective) (8 octobre)
– Vague de manifestations au Guatemala en soutien au président élu Bernardo Arévalo (revue de presse) (7 octobre)
– Crise politique au Guatemala : Arévalo dénonce un « coup d’État en cours » et appelle à la résistance (Luis Reygada / L’Humanité) (9 septembre)
– Au Guatemala, la disqualification du parti du président élu Arévalo suspendue temporairement par la justice (Le Monde) (5 septembre)
– Guatemala : un espoir de changement ? (Bernard Duterme / CETRI) (26 juillet)
– Guatemala : un «entre-deux tours» judiciarisé (revue de presse) (24 juillet)
– L’intégrité du processus électoral au Guatemala mise à mal par une judiciarisation excessive (Communiqué collectif) (22 juillet)
– Au Guatemala, la disqualification à la présidentielle du parti d’Arevalo suspendue (France 24) (16 juillet)
– Élections au Guatemala (communiqué commun / Collectif Guatemala – FAL) (11 juillet)
– Présidentielle au Guatemala: le recomptage des voix du premier tour confirme la qualification de la gauche (RFI) (8 juillet)
– Élections au Guatemala : résultat qui crée la surprise et suspension de la proclamation (revue de presse) (29 juin)